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17 octobre 2010 7 17 /10 /octobre /2010 14:53

I- Quelques données structurantes.

Le but  ne consiste pas à donner un tableau  chiffré exhaustif ni de faire dans l’apologie ou dans le nihilisme ambiant ; nous reprenons ici un minimum de données pour susciter la réflexion.

      Superficie de la wilaya : 2.957,9362 km2.

      Nombre d’habitants (fin 2006) : 1.268.964.

      Densité au km2 : 429 habitants, soit une des plus fortes pour les régions de montagne de part le monde !

      6,24% de plaine, 10,50% de bas piémonts, 31,42% de hauts piémonts, et 51,84% de très haute montagne ! D’où l’extrême rareté du sol, notamment celui susceptible d’être affecté à l’urbanisation dans la vallée du Sébaou.

      1400 villages et hameaux,  35,13%  de population urbaine et  64,87%  de population rurale.

      01 seule ville moyenne (Tizi-Ouzou) ; quelques  petites villes (20000 à 50000 hab.) ; une quinzaine d’agglomérations urbaines (≥ 5000 hab.), officiellement.

      Une dynamique d’urbanisation forte : 8% en 1966, 15,3% en 1977, 23,4% en1987, et 36% en 2004, avec comme conséquences :

      une ruée vers la « capitale régionale  » (Tizi-Ouzou) ;

      de multiples surcoûts de  concentration urbaine (en l’absence de gestion adéquate ; 

      un rétrécissement des terres agricoles de plaine;

      une dévitalisation de la montagne.

■Urbain/Rural ? L’illusion nominaliste : quelques interrogations. 

      Que vaut la notion de population rurale dans notre wilaya (compte tenu des réalités socioéconomiques et psychosociologiques) ?

      Que vaut la notion de village quand on constate de plus en plus de  concrétions en réseaux de villages ?

      Que valent donc les classifications des agglomérations et les taux d’urbanisation figurant dans les annuaires statistiques?

      La population d’une ville, comme Tizi-Ouzou, est-elle actuellement de 95000 habitants ou de 115000 à 120000 habitants (+ étudiants +présents du voisinage + concrétion des bourgades proches…) ?

  

Et si une bonne partie du « rural » n’était que de l’urbain spécifique ignoré[1] (dans les deux sens du terme) ? La wilaya n’est-elle pas plus proche de la configuration d’une immense ville tentaculaire et atypique avec Tizi-Ouzou comme centre-ville et les anciens chefs-lieux de daïras comme relais des quartiers périphériques et donc une multitude de « quartiers sensibles » ?

■Les données démographiques  dans 10 ans, dans 20 ans… quelles conséquences ?

      Estimations de la population de la wilaya: 1 500 000 hab. en 2018 ; 17 00 000 hab. en 2028…

 

      Déficit actuel en logements au niveau de la wilaya: 30 000 à 50 000[2], avec les conséquences sur le prix du logement et sur celui des terrains à bâtir[3].

 

      Le besoin supplémentaire en logements sera de 10 000 à 15 000 par an d’ici 2018 et de 8 000 à 10 000 par an de 2018 à 2028

 

      A cela, il faut ajouter les infrastructures d’accompagnement (là encore avec un énorme déficit à rattraper).

 

      Alors que plus de la moitié des entreprises de réalisation ont cessé d’activer au niveau de la wilaya…

Quand le bâtiment ne va pas…

► D’où la nécessité de créer de nouvelles agglomérations et d’en rechercher les localisations en dehors de la vallée et des terres à bon potentiel agricole

► D’où, aussi, la nécessité d’attirer vers la wilaya les entreprises de réalisation.

Quelques conséquences de ces données. Crise urbaine à dimension fondamentalement humaine:

      Problème de concentration démographique dans la vallée et dans la ville de Tizi-Ouzou surtout ;

      Problème de circulation pendulaire des flux démographiques entre le « centre ville régional »et ses « périphéries de l’intérieur » de la wilaya ;

      Problèmes de fixation des populations par de l’emploi à proximité de l’habitat;

      Problème de rétention des compétences (prés de 10000 diplômés par an) ;

      Problème d’équipement des quartiers sensibles (y compris à T.Ouzou),

      Enfin, problème des spécificités fonctionnelles du « centre-ville » (T.Ouzou) des centres relais et des quartiers périphériques.

II – Des pratiques dans le domaine de l’urbanisation et la gestion de la ville.

■  Période précédant le passage à l’économie de marché (exemple de la ville  de Tizi-Ouzou) :

      Requalification du boulevard central ;

      Construction de quelques gros équipements publics (éducation, santé, culture, loisirs, tourisme, etc.) ;

      Construction de plusieurs cités (logements sociaux) dans la logique de l’urbanisme dit « moderne »;

      Prévision d’une centaine d’équipements publics et collectifs pour la nouvelle ville ;

      Lancement de plusieurs lotissements pour constructions individuelles.

   ► Le pacte social égalitariste, sous la houlette du tout Etat, a permis à la ville de T.Ouzou de rêver  d’un avenir ambitieux (wilaya déclarée pilote).

  ■ A partir du début de la décennie 1990, la problématique de l’urbanisme va se situer dans un nouveau contexte:

      Effondrement des moyens financiers de l’Etat ;

      Désengagement de l’Etat de plusieurs activités (comme le BTPH) et appel à l’initiative privée dans plusieurs domaines (santé, culture, formation, tourisme, loisirs, notariat et professions du tertiaire de façon générale) ;

      Culture du moins d’Etat, de la régulation par le marché ;

      Contexte dramatique où les préoccupations politiques étaient totalement focalisées sur le terrorisme qui s’attaquait aux fondements de l’Etat nation.

Quand l’Etat n’est pas là : le dévoiement de la gestion de la crise du logement et de la gestion de la ville.

  

► Ce contexte déterminera lourdement la configuration du processus d’urbanisation :

      Absence de planification urbaine et  logique du développement au fil de l’eau ;

 

      Logique de sur densification et d’abandon de l’équipement public ;

 

      Fondement de l’urbanisme sur la forme coopérative immobilière ;

 

      Dégradation du cadre de vie, accaparement des espaces publics

 

      Ignorance des représentations citoyennes (associations, comités de quartiers djemâa de villages..) Et professionnelles par les acteurs « décideurs » au niveau de collectivités territoriales.

Au total, jusqu’à ces dernières années, une urbanisation en crise paroxystique:

      ● Qui élague le développement humain ;

      ● Plus orientée sur l’économie de bazar que sur l’encouragement de l’entreprise productrice;

      ● Ne se préoccupe pas du développement durable ;

      ● Qui pratique l’opacité comme méthode de travail ;

      ● Qui conduit à la désocialisation par marchandisation et prédation des espaces publics;

      ● Qui débouche sur l’absence d’équité sociale ;

      ● Qui ignore la bonne gouvernance et privilégie le court terme sur l’avenir  et l’intérêt de particuliers sur l’intérêt général.

A cela, il faut ajouter l’accumulation de retards depuis que les moyens de l’Etat se sont améliorés.

D’où la fracture Etat (au sens large) /société et le développement d’une culture de l’émeute comme mode de communication…

 

 III- Des projets prioritaires autour de plusieurs lignes directrices

Il ya lieu pour l’atelier dans une première étape, à travers les interventions des conférenciers, d’affiner l’analyse du phénomène d’urbanisation et de celui de la dégradation du cadre de vie et  de prendre connaissance des pratiques et méthodes en œuvre dans les pays qui ont développé des politiques et des outils permettant de maîtriser l’urbanisation, mais aussi de voir ce que les textes législatifs récents, en Algérie, prévoient comme perspectives pour la politique d’urbanisme.

Dans une deuxième étape l’atelier doit examiner les projets et pistes d’actions identifiés (y compris ceux présentés dans les conférences), selon le séquençage (indicatif) suivant :

1-   La mise fin aux laisser-aller de toutes natures (police d’urbanisme, éradication des poches de banditismes par le redéploiement des forces de sécurité idoines..).

 

2-   Le renforcement de la cohésion sociale, par l’équité sociale, l’intégration sociale (éradication de l’habitat précaire…), par l’accessibilité de la culture et aux services publics, l’amélioration du cadre de vie, la gestion participative (zones urbaines et villageoises) et de façon générale, des méthodes de gestion urbaine efficientes.

 

3-   Comment renforcer l’attractivité de la wilaya pour les entreprises de réalisation ?

 

4-   Le renforcement des fonctions spécifiques de la ville (celles de Tizi-Ouzou, celles des petites villes) et la mise fin à la dissipation des réserves foncières dans toutes les villes de la wilaya.

 

5-   Mettre un frein à la ruée vers Tizi-Ouzou et à l’étroitesse par plus d’équité entre toutes les agglomérations de la wilaya. Comment permettre à la population des zones villageoises de vivre décemment sur place ?

 

6-   Améliorer l’accessibilité aux services spécifiques de la ville de Tizi-Ouzou par une structuration  du réseau de transport vers (de) l’intérieur de la wilaya (gares routières sous régionales et stations de traitement des voyageurs au niveau de chaque sous région, lignes ferroviaires, téléphériques…).

 

7-   Renforcer les prérogatives et les moyens de l’agence foncière.

 

8-   Envisager l’implantation progressive de nouvelles agglomérations en dehors des terres à bon potentiel agricole, partout où la topographie et les disponibilités foncières le permettent.

  

IV-          La loi n° 06-06 du 20/02/2006 d’orientation de la ville : une loi prometteuse et un programme de travail.

 

  • Par les principes directeurs de l’urbanisme qu’elle édicte (option pour la cohérence et l’optimisation, la bonne gouvernance, l’équité sociale, le développement humain, le développement durable, la culture et l’information, la gestion participative, sans oublier la place de choix des acteurs économiques).

 

  • Par les objectifs qu’elle fixe à la politique urbaine (notamment réduction des disparités, lutte contre l’habitat précaire et l’insalubrité, maîtrise des plans de transport de déplacement et de circulation, garantie et généralisation des services publics, protection de l’environnement, lutte contre les fléaux sociaux…).

 

  • Par la désignation précise des acteurs de l’urbanisme selon l’importance des enjeux et les domaines d’implication (option pour un mieux d’Etat qui arrête les grands objectifs et les normes, partenariats, concertation, veille sur la cohérence des instruments de la politique de la ville, contrôle, évaluation…).

 

  • Par l’inventaire des instruments de la politique et de la régulation urbaine et environnementale et la détermination de nouveaux organes et mécanismes en la matière (observatoire national de la ville, planification et orientation sectorielles, contrats de développement de la ville, prix de la république…).

[1] Les villages constituent les agglomérations les plus anciennes de la wilaya et représentaient (avant de connaître les transfigurations opérées depuis quelques décennies) les vestiges d’une organisation sociétale dont les conditions et les structures objectives de reproduction ont quasi-totalement disparu ; c’est dans ce sens que les villages  constituent un patrimoine culturel à préserver et à valoriser ; actuellement, ils sont utilisés essentiellement lieux d’habitat : il y a lieu par conséquent ( tout en sauvegardant le cachet culturel )  de les requalifier et de les consolider par la mise à la disposition des populations   toutes les structures nécessaires à la vie moderne et par le développement des activités nécessaires à la fixation et à l’épanouissement des populations.  

[2] C’est une erreur que de déterminer le besoin en logement en se basant sur le fait que les maisons  traditionnelles (au niveau des villages) permettent d’accueillir plusieurs familles ; c’est ignorer la tendance à la disparition de la famille élargie, notamment celle où coexistent plusieurs couples de même fratrie ; c’est ignorer que la famille a tendance à s’établir en fonction du lieu de travail.

[3]  C’est cet énorme déficit (et pas seulement les coûts de construction) qui explique les niveaux des prix. Le F3 vieux de 30 ans à la Nouvelle ville est échangé à 2 800 000 DA et plus (au-delà du 5èm étage) et à 3 000 000 DA et plus (au  dessous du 5ème étage) ; le loyer hors logement social se situe entre 10000 et 15000 DA/mois. Comment un  jeune  d’une famille moyenne qui vient de trouver un travail peut-il envisager son projet conjugal dans ces conditions ? Le phénomène de dissipation des terrains à bâtir au niveau des villes, Tizi-Ouzou en particulier, est directement lié au niveau, exceptionnellement, élevé de cette rente foncière dont l’Etat ne s’est même pas donné les moyens de tirer profit, pour les caisses des communes, par exemple, laissant par ailleurs le champ à la corruption de fonctionnaires ( la nature a horreur du vide) . 

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